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Page:Hubert, Mauss - Mélanges d’histoire des religions, 1909.djvu/198

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mythologies les mieux connues, comme se confondant dans la notion générique d’ancêtres mythiques, personnels, des individus des différents clans totémiques[1]. De telle sorte que, suivant l’interprétation, les préjugés hâtifs des auteurs, une tribu nous apparaîtra comme croyant ses magiciens initiés ou par les morts ou par les esprits de la nature, sans que les croyances des indigènes soient vraiment différentes. Ainsi, en particulier, dans les tribus du nord de la Nouvelle-Galles du Sud, décrites par M. Cameron[2], les Bookoomurri initiateurs des magiciens sont plus que des âmes des morts. Déjà au surplus la révélation par ces esprits était fort compliquée. Si du moins il s’agit bien de la tribu des Ta-ta-Thi dans les documents que nous citons[3] ; en tout cas, pour certains magiciens, ceux-ci montaient au ciel « par une fenêtre (?) » (voir les Bookoomurri ?), et y réussissaient, parce qu’ils avaient mangé un morceau de la peau d’un cadavre de vieille femme, dont l’esprit (goomatch) les lévitait[4]. Nous hésitons à dire que la révélation, dans la tribu de la baie de la Rencontre[5], les

  1. Tels sont par exemple les Iruntarinia (Arunta) qui initient le magicien : ils sont à la fois des ancêtres de l’Alcheringa (temps mythiques), des âmes de morts, des fées, des dieux et des diables. C’est le cas encore des Mura-Mura (Dieri), puisque, comme nous en avions fait l’hypothèse dans une de nos leçons de 1902, cette notion de dieu créateur se réduit en somme à celle des ancêtres totémiques toujours vivants, réincarnés et initiateurs. Voir Howitt, Legends of the Dieri and Kindred Tribes of central Australia, J. A. I., 1904, N. S., XXXIV, p. 100 et suiv.
  2. Tribus des Ta-Ta-Thi, Wathi-Wathi, etc. Notes on Some Tribes of New South Wales, J. A. I., 1885, t. XIV, p. 368, cf. p. 362, 369 et 370 : Traditions and Folklore of the Aborigenes of New South Wales, Science of Man, Australasian Anthropological Journal, VI, p. 46.
  3. Dans un seul article d’ethnographie, M. Cameron a en effet mêlé des renseignements sur des tribus diverses.
  4. Howitt, On Some Australian Beliefs, J. A. I., XIII, p. 197 ; cf. Cameron, Notes on some Tribes of New South Wales, J. A. I., XIV, p. 359 et 360. Le gumatch, esprit, qui n’est autre que la peau du ventre de la vieille femme morte, emporte le magicien au ciel, troue la voûte ; par derrière la voûte solide, le magicien apprend toutes choses et retourne au monde.
  5. H. E. A. Meyer, Manners and Customs of the Aborigines of the Encounter Bay Tribe, in Woods, Native Tribes of South Australia, p. 197, 198, 201 et 202.