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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/154

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Essais.

roit affirmer que tous les corps sans exception seroient mis en mouvement par un choc semblable. Donc aucune induction expérimentale ne procede du raisonnement ; elles naissent toutes de la coutume[1].

  1. Rien n’est plus ordinaire aux Écrivans, à ceux même qui traitent des sujets de morale, de politique, ou de physique, que de distinguer entre raison et expérience, & d’y supposer deux manieres différentes d’argumenter. La premiere, se prend pour le résultat pur & simple de nos facultés intellectuelles : on l’envisage comme établissant des principes particuliers de science et de philosophie sur la mesure des choses considérée à priori, & comme découvrant les effets dans les opérations des causes dont ils dérivent. La seconde, est supposée dépendre uniquement de l’observation et des sens : c’est par leur moyen que sachant ce qui a résulté d’un objet, nous sommes en ???? de déterminer ce qui en résultera. C’est ainsi par exemple, que la forme limitée du gouvernement civil d’une constitution assujettie aux loix peut être défendue de deux manieres. Par la raison : en réfléchissant sur la grande fragilité & sur l’extrême corruption de la nature humaine, nous jugeons qu’il est contraire à la sûreté publique de confier à un seul homme une autorité illimitée. Par l’expérience : l’histoire de tous les tems & de tous les pays nous expose les énormes abus que des hommes ambitieux ont d’un pouvoir aussi imprudemment confié.
    La même distinction se fait sentir dans les délibétarions qui concernent les affaires de la vie humaine. On se fie à un