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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/304

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Essais.

ainsi dire, de la seconde main par maniere de réjaillissement, en se faisant une vanité délicieuse d’exciter l’étonnement d’autrui. Avec quel empressement ne reçoit-on pas les relations merveilleuses des voyageurs ; leurs descriptions de monstres terrestres & marins, les récits qu’ils sont d’aventures surprenantes, d’hommes donc la figure est étrange, & les mœurs bisarres ? Que sera-ce si l’esprit de religion vient se joindre à l’amour du merveilleux ? Dès lors le sens commun expire[1] : & aussitôt le témoignage humain perd tous ses droits. Un homme qui professe quelque religion peut être enthousiaste jusqu’à s’imaginer qu’il voit ce qu’il ne voit point, ce qui n’a même aucune réalité : il peut savoir que ce qu’il raconte est faux, & cependant, y persévérer avec les meilleures intentions du monde, afin d’avancer les in-

  1. L’esprit de religion n’est point destructif du bon sens. Le flambeau de la religion marche toujours devant celui de la révélation. Mais le sophisme perpétuel des incrédules, c’est de confondre la religion avec tous les genres de superstitions qui ont couvert, en tout tems & en tous lieux, la face de la terre. Note de l’Éditeur.