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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/388

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Essais.

les géometres & tous les métaphysiciens les étalent si pompeusement, & avec une espece de triomphe. Une quantité réelle, infiniment moindre que quelque quantité finie que ce soit, contenant des quantités infiniment moindres qu’elle-même, & ainsi à l’infini : c’est-là un édifice hardi jusqu’au prodige, mais dont la masse est trop pesante pour pouvoir reposer sur la base d’une prétendue démonstration, parce qu’il choque les principes les plus clairs & les plus naturels de la raison humaine[1]. Mais, ce qui est le plus

  1. Quelque dispute qu’il puisse y avoir sur les points mathématiques, il faut tomber d’accord qu’il y a des points physiques ; c’est à-dire, des parties d’étendue, qui ne sauroient être divisées ou diminuées, ni par les yeux, ni par l’imagination. Ces images donc, peintes dans notre imagination ou dans nos sens, sont absolument indivisibles, & par conséquent les mathématiciens doivent convenir qu’elles sont infiniment plus petites qu’une portion réelle d’étendue : cependant, si quelque chose paroît certain à la raison, c’est qu’un nombre infini de ces points compose une étendue infinie ; à combien plus forte raison doivent donc le faire un nombre infini de ces parties infiniment petites d’étendue, que l’on suppose encore divisibles à l’infini ? Note de l’Auteur.