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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/390

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Essais.

de contradictions & d’absurdités. La raison semble ici étonnée, & demeure suspendue en quelque façon, sans avoir besoin d’insinuations sceptiques pour se défier d’elle-même, & du terrein sur lequel elle marche. Elle voit des endroits que le grand jour éclaire ; mais ce jour est bordé des plus profondes ténebres. Elle se trouve si éblouie & si confondue entre ces deux extrêmes, qu’il lui est presque impossible de prendre un parti assuré sur quoi que ce soit.

Lorsque les sciences abstraites partent de l’étendue à la durée, l’absurde témérité de leurs décisions devient, s’il étoit possible, encore plus palpable. Un nombre infini de portions réelles de tems, qui se succedent & s’épuisent l’une après l’autre, est une contradiction si évidente qu’il est inconcevable qu’elle puisse être admise par un homme à qui la science n’a pas gâté le jugement, au lieu de le rectifier.

Cependant la raison demeure inquiete, & ne goûte point de repos dans ce scepticisme même, où elle a été conduite par tant d’absurdités & de contradictions. Il est absolu-