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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/392

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Essais.

Les objections que font les sceptiques contre l’évidence morale, ou contre les raisonnemens qui concernent des matieres de fait, sont, ou des objections populaires, ou des objections philosophiques. Les objections populaires sont prises de la foiblesse naturelle de l’entendement humain, des opinions contradictoires qui ont prévalu en

    nation & que par conséquent elles ne peuvent pas être divisibles à l’infini ; nous pouvons prononcer en général, qu’il s’en faut beaucoup que les idées de plus grand, de moindre, ou de l’inégalité, qui sont les principaux objets de la géométrie, soient assez exactes & assez déterminées pour y pouvoir fonder des inductions aussi extraordinaires. Qu’on demande à un géometre ce qu’il entend en disant que deux quantités sont égales : il sera obligé de répondre que l’idée de l’inégalité est une idée indéfinissable ; & que pour la faire naître, il suffit de placer devant soi deux quantités égales. Or, n’est-ce pas en appeler aux objets tels qu’en général ils paroissent aux sens ou à l’imagination ? Ces objets ne peuvent donc jamais fournir des conclusions aussi contraires à ces mêmes facultés par lesquelles ils sont apperçus. Il suffira pour le présent d’avoir fait cette remarque en passant, sans y insister davantage. Assurément tous les amateurs de la science, sont intéressés à ne se point exposer au ridicule, & au mépris des ignorans, en tirant des conclusions aussi absurdes. Et c’est-là, si je ne m’abuse, la solution la plus prompte qu’on puisse donner de ces difficultés. Note de l’Auteur.