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Page:Hume - Œuvres philosophiques, tome 1, 1788.djvu/474

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Les quatre.

où il soit question de la beauté du cercle. La raison en est bien évidente ; c’est que le beau n’est pas une propriété de cette figure : il n’existe nulle part dans la courbe dont tous les points sont également éloignés du centre ; il n’est que l’effet qu’elle produit dans une ame capable de sentir : ni les sens, ni le compas, ni les raisonnemens mathématiques, ne le découvriront jamais dans le cercle ou dans ses attributs.

Ce géometre qui ne trouva point d’autre plaisir, dans la lecture de Virgile, que de suivre le voyage d’Énée sur la carte, pouvoit avoir une parfaite intelligence de chaque mot latin employé par ce divin poëte, & par conséquent une idée distincte de la narration entière, plus distincte même que ceux qui n’auroient pas si bien étudié la géographie. Il connoissoit donc tout ce qu’il y a dans l’Éneide, hormis sa beauté ; c’est qu’à proprement parler la beauté n’est pas dans le poëme ; elle est dans le goût du lecteur : elle doit donc être à jamais inconnue à tous ceux qui n’ont point de délicatesse dans l’esprit, & qui ne savent point sentir ; eussent-ils d’ail-