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Page:Huysmans - Certains, 1908.djvu/106

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CERTAINS

d’un geste qui lance, à toute volée, ces germes du mal sur la ville muette.

Vêtu en paysan, coiffé d’un chapeau à larges bords, il darde dans une face osseuse, des yeux de braise, grimace un sourire sardonique atroce. Ses cheveux flottent, sa longue barbe divulgue par sa coupe une origine américaine que certifie la forme de ce chapeau rappelant par certains détails de ses ailes, par certains de ses plis, la coiffure presque bretonne de quelques quakers.

Il semble qu’il soit passé par ce nouveau-monde qui a lavé dans sa cupide hypocrisie, tonifié, rajeuni, les vices de la vieille Europe.

En scrutant l’horrible face, l’on peut discerner la jubilation froide et décidée du Diable qui sait de quelles vertus infâmes sont douées les larves qu’il essaime. Il sait aussi que la récolte est sûre et ses hideuses lèvres susurrent des Rogations à rebours, invitent railleusement son inerte Rival à bénir ces maux de la terre, à consacrer la formidable moisson de crimes que ce grain prépare !


Cette planche est vraiment éloquente, vraiment superbe. Ce Terrien à la structure énorme, dont le talon de sabot emplit toute la superficie