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Page:Ivoi - Les Cinquante.djvu/138

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Quand le jeune homme eut achevé, elle pensa à haute voix :

— Oui, seule je puis le décider à sortir de l’inaction, à n’être pas la victime résignée que des sacrificateurs se préparent à mener au supplice.

Puis résolument :

— Nous partirons demain pour l’île d’Elbe.

— Oh ! Madame, balbutia Milhuitcent, vous êtes une sainte.

— Non, répondit-elle avec un doux sourire, je suis une amie.

Et reprenant sa phrase interrompue :

— Nous ne pouvons quitter Vienne ensemble, sans attirer l’attention.

— Certes, non.

— Vous allez retourner à votre hôtellerie. Vous attendrez mes instructions. Je vous indiquerai où vous devrez me retrouver.

— Nous obéirons.

— Moi, je vais m’occuper de donner à mon départ une couleur plausible.

Les Français s’inclinèrent.

— Pour cela, je me concerterai avec mon mari.

Elle conclut doucement :

— Et lui, que j’aime autant qu’il m’aime, m’aidera de sa raison, de son savoir, de ses conseils, en cette circonstance comme en toute autre.

Elle n’avait pas achevé qu’Espérat se laissait glisser à genoux au fond de la voiture.

Il saisit la main de la comtesse, la porta dévotieusement à ses lèvres et bégaya :

— Oh ! Madame, Madame, pardonnez-moi d’avoir douté une seconde ! Pardonnez ! Vous êtes le bon ange du Génie !