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Page:Joseph Reinach - Histoire de l’Affaire Dreyfus, Eugène Fasquelle, 1905, Tome 5.djvu/519

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RENNES


On ne se débarrasse pas de l’impondérable. Et, tout à l’heure, au Cercle militaire, ils trouveront le journal de Drumont, l’article sur les deux bordereaux.

Coupois, le greffier, à la demande de la défense, donna alors lecture de quelques pièces : le rapport des experts sur le papier-pelure ; la déposition de l’ouvrier d’art Écalle qui avait dessiné un fusil pour Esterhazy ; deux lettres du misérable, l’une récente, à Roget, rien que des injures, l’autre de mars 1894, à Grenier sur des documents et renseignements fournis à Jules Roche ; enfin une lettre de Schwarzkoppen, du 29 octobre 1894, que Chamoin avait produite au huis-clos, quand il avait dépouillé le dernier dossier secret révélé par Cuignet. C’était quinze jours après l’arrestation de Dreyfus ; Schwarzkoppen envoyait à Berlin « des renseignements de bonne source », notamment sur « les manœuvres de forteresse de Paris[1] », ces manœuvres de Vaujours où l’auteur du bordereau avait peut-être assisté. Labori observa que la pièce, en 1894, n’avait pas été retenue contre Dreyfus ; elle s’appliquait manifestement à Esterhazy.

Cuignet, enragé, répliqua « qu’il ne résultait pas du tout de la date, dont arguait l’avocat, que les documents n’auraient pas été fournis par Dreyfus » : « Je ne dis pas qu’ils l’aient été… Mais les attachés, avant d’expédier les documents, les conservaient parfois pendant plusieurs jours[2]. » Puis Roget, Picquart, Hartmann, Mercier dirent encore quelque mots, chacun voulant avoir le dernier. Esterhazy, dans cette lettre à Grenier qu’avait lue le greffier, signalait la misère des effectifs du VIe corps au printemps de 1894, « une com-

  1. Voir t. II, 115.
  2. Rennes, III, 559, Cuignet.