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Page:Journal asiatique, série 1, tome 2.djvu/155

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joie maligne, et ne l’en pressa que plus de lui conter son infortune. Le serpent reprit ainsi :

« Un sage de Brahmapour, Koundinya, avait un fils âgé de vingt ans, doué de toutes les vertus. Un cruel destin voulut qu’il tombât sous ma dent venimeuse : il en mourut. À la vue de son fils Sousila étendu sans vie, le brahmane, pénétré de douleur, se précipite et se roule à terre. Aussitôt ses amis, ses parents, tous habitans de Brahmapour, accourent et se rassemblent autour de lui, mais un sage, nommé Kapila, s’approchant de lui : Eh ! quoi, dit-il, Kaundinya, quelle folie est la tienne, et où t’entraîne la douleur ?

« Dis-moi où sont allés ces rois du monde, avec leurs puissantes armées et leurs charriots redoutables ? Tout, sur la terre où ils ont régné, atteste encore aujourd’hui qu’ils ne sont plus[1].

Le corps périt d’une mort lente et insensible ; ainsi le vase d’argile, que le feu n’a pas séché, se dissout quand on le plonge dans l’eau.

La jeunesse, la beauté, la richesse, la puissance, la vie et la société de ce qui nous est cher ; tous ces biens ne durent qu’un jour : le sage ne leur doit pas un regret.

  1. Je dois avertir que j’ai fait un choix parmi les nombreuses maximes que l’auteur met dans la bouche de Kapila. J’ai cru pouvoir, sans nuire à l’ensemble de la fable, retrancher celles qui ne sont que des répétitions de pensées déjà exprimées. Si je me suis écarté en deux ou trois endroits seulement du sens adopté par Jones et Wilkins, ce n’est qu’après avoir consulté M. Chesy, qui a eu la complaisance de revoir ce morceau, et de m’éclairer sur les passages qui pouvaient présenter quelque obscurité.