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Page:Journal de Gouverneur Morris.djvu/280

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JOURNAL DE GOUVERNEUR MORRIS.

tention, je crois, de me faire parler) que le discours du roi comprendra une partie du mien mêlé à d’autres choses. Je réplique qu’il n’y aura rien du mien, et en vérité je le crois. Je lui dis encore que je renonce à toute idée de diriger la conduite du roi dans les circonstances actuelles, et de fait j’y renonce. J’accompagne à leur sortie lady Sutherland et Mme de Coigny, et M. Short me suit. En montant en voiture lady Sutherland me demande d’aller les voir plus souvent ; elle m’attend à dîner dimanche ; je devrais m’inviter moi-même le matin. Elle ne fait aucune attention à M. Short qui est à mes côtés, et quand je me tourne vers lui pour lui parler après qu’elle est partie, je lui trouve la figure décomposée et la voix altérée. Il va donc rentrer chez lui, le cœur rempli de fiel contre moi, parce que l’on n’a pas fait attention à lui. C’est dur, mais c’est la nature de l’homme. Il est chargé d’affaires et je ne suis qu’un particulier. Il attend de tous, et surtout du corps diplomatique, une déférence et un respect marqués. Je lui souhaite de l’obtenir, mais dans ces parages, c’est impossible pour l’instant.


7 septembre. — Je dîne aujourd’hui avec M. de Montmorin ; Mme de Staël est là avec son cortège. Je trouve que l’évêque d’Autun et elle le pressent très fort pour je ne sais quoi. Je vois M. Short, dont les traits n’ont pas encore repris leur calme. Je soupe avec le comte de La Marck qui me dit que le but de Mme de Staël et de son évêque était d’obtenir la révocation du décret l’excluant lui et les autres du ministère, ce qui le réduit au rang de très petit intrigant. Nous avons ici les archevêques d’Aix et de Lyon, c’est-à-dire les ci-devant archevêques, et nous avons Mme d’Ossun, une des dames d’atours de la reine. L’archevêque d’Aix raconte qu’il s’occupe de rédiger une protestation contre la Constitution au nom de la noblesse et du clergé. La noblesse veut protester contre l’égalité naturelle