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Page:Journal des économistes, 1842, T1.djvu/11

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duite des travaux de viabilité. Les uns réclament cette action d’une manière absolue, les autres ne l’admettent que d’une manière mixte. Jusque-là, rien de plus légitime, er si la question restait sur ce terrain, elle ne ferait pas à l’autorité, quoi qu’il pût s’ensuivre, une part trop grande. Les voies de circulation, dans leur régime actuel, sont l’œuvre de l’État et la propriété commune : on n’innoverait rien en lui laissant le soin de doter le pays d’un réseau complet de ces nouveaux chemins, enfants du génie moderne. Mais ce qui serait fâcheux, c’est de voir ce système réagir sur la neutralité du pouvoir au milieu des intérêts privés ; ce qui serait à redouter, c’est une exagération de son initiative, utile dans certains cas, nuisible dans beaucoup d’autres. Il y a à un écueil dont il faut se dé fendre. Un Gouvernement ne peut pas prétendre à dominer l’activité particulière, même avec l’intention de la servir. Ce serait pour lui un trop grand souci et une responsabilité trop lourde. À peine suffit-il au soin des affaires générales ; n’y ajoutons pas les affaires privées. Cependant quelques esprits y songent, et ce ne sont pas les illusions les moins dangereuses du moment.

On le voit, l’Économie politique a un vaste champ devant elle, et des difficultés sérieuses l’y attendent. Elle ne les ré- soudra, pas toutes, et c’est le reproche qu’on lui adresse. On la proclame impuissante parce qu’elle n’a pas trouvé de remède à diverses infirmités industrielles et commerciales. Mais il n’est point de science d’observation qui n’en soit là ; elles ont toutes un côté conjectural qui est la sanction de leurs parties positives. La médecine ne guérit pas toutes les maladies ; en est--elle moins pour cela une science, une belle science ? La philosophie n’a pas trouvé, ne trouvera jamais le problème des existences, ce secret de Dieu : s’ensuit-il que la philosophie soit une science sans valeur, sans intérêt, sans portée ? Comme toutes les connaissances humaines, l’Économie politique a ses doutes, ses mécomptes, ses abîmes. Elle sait que la richesse d’un peuple est dans son travail, mais elle n’a pas trouvé la loi de justice distributive par laquelle la mesure du travail déterminera celle des jouissances. Elle ignore les moyens d’épargner les tortures de la faim aux malheureux que les machines déplacent et que la concurrence laisse sans emploi. Sans l’aide de la morale et de la charité, elle ne pourrait rien