Aller au contenu

Page:Jouvet - Réflexions du comédien, 1938.djvu/217

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’exiger 12 % du chiffre d’affaires de ce commerçant. Il ne faut donc pas s’étonner que la profession soit accessible aussi bien aux négriers qu’aux autres citoyens et qu’il s’y rencontre des personnages qui n’honorent personne.

Donc, cette cérémonie qu’est une représentation et qu’on trouve à l’origine de l’humanité, d’où sont nés des religions et des cultes, dont l’histoire même atteste l’importance, le théâtre, ne bénéficie même pas de la protection ou du contrôle qu’on accorde aux huissiers, aux produits agricoles, aux médecins ou aux pharmaciens, et la police exige d’un marchand forain ou d’un montreur d’ours des références qu’on ne demande pas à un directeur de théâtre.

Il y a un ordre des avocats, une chambre des notaires, il existe pour la plupart des métiers des syndicats ou des chambres patronales mais il n’y a pas d’ordre dramatique. La corporation théâtrale est encore à organiser.

On éprouve quelques inquiétudes de l’espèce d’impossibilité d’organisation qui règne chez nous et du désordre organique qui s’y perpétue.

Certes, le théâtre a toujours été, comme la galanterie, régi par des législations à retardement ou capricieuses, des arrêtés ou des décisions souvent arbitraires et d’un parfum très féodal. Mais ballotté longtemps entre l’humeur du Prince et la rigueur de l’Église, le théâtre se voit encore aujourd’hui malmené par l’Assistance Publique, successeur des frères mendiants.