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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/111

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CHAPITRE XVII.

La Révocation de l’Édit de Nantes.


À coup sûr, quand Louis XIV monte sur le trône, nous sommes loin de la barbarie du moyen âge, l’esprit humain est bien en possession de lui-même. C’est l’époque des plus parfaits écrivains, des artistes les plus accomplis, des mœurs les plus raffinées, de la société la plus élégante. La France, à ce moment-là, est partagée entre deux croyances ; l’une souveraine, et l’autre seulement tolérée, mais tolérée en vertu d’un pacte solennel. Les protestants, grâce à l’édit de Nantes, jouissent de tous les droits de citoyens, ils peuvent aspirer à tous les emplois ; ils ont des villes où leur culte se célèbre sans entraves, des chambres mixtes dans les parlements. Cette paix aurait pu être durable, même dans un pays où les fils des victimes de la Saint-Barthélemy coudoyaient à chaque pas les fils des ligueurs, si l’on avait eu dans le cœur des sentiments véritablement chrétiens. Mais le feu des haines religieuses n’était que comprimé sans être éteint. Les hommes d’État et les fanatiques aspiraient avec une égale ardeur au renversement de l’édit de Nantes. Henri IV, disaient les politiques, a organisé le parti protestant comme parti, non comme religion, il a constitué un État dans l’État : cette égalité armée de deux religions en présence l’une de l’autre ressemble plutôt à une trêve qu’à la paix. Richelieu avait