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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/125

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se convertir[1]. D’autres erraient par les chemins, sans asile, traqués comme des bêtes, ou parvenaient à s’expatrier sous des déguisements. Le roi enfin, pour porter le dernier coup, signa à Fontainebleau, le 22 octobre 1685, la révocation de l’édit de Nantes[2].

Louis XIV, en révoquant l’édit de Nantes, n’ordonna pas aux protestants de se faire catholiques ; il reconnaît lui-même dans l’édit révocatoire que l’abjuration ne peut être prescrite par une loi[3]. Il ne s’attribue que le droit de défendre l’exercice du culte[4], de chasser les ministres sous peine des galères[5], de faire baptiser les enfants[6], et de contraindre les nouveaux convertis à persévérer[7]. Il ne permet pas d’acheter la liberté de conscience au prix de l’exil. Les ministres seuls ont le choix entre l’exil, la conversion ou les galères ; les simples fidèles sont contraints de rester en France, et de renoncer au moins extérieurement à l’exercice de leur religion. Il fallut aussitôt prendre des mesures contre la dépopulation de la France. Dès le 5 novembre 1685, on prononça des peines terribles contre les officiers de navires et bateliers qui favorisaient l’émigration. Les femmes des nouveaux con-

  1. On mettait des inspecteurs à la porte des églises pour connaître ceux des nouveaux convertis qui les fréquentaient ou non. L’instruction du 8 décembre 1686 porte que cette mesure n’a pas produit de bons résultats et qu’on y renonce.
  2. Voyez, sur toute cette persécution, l’Histoire des réfugiés protestants de France, depuis la révocation de l’Édit de Nantes, par M. Charles Weiss, t. I, chap. II et III.
  3. Art. 12.
  4. Art. 2 et 3. On fut jusqu’à prévoir le cas où les protestants s’embarqueraient pour chercher sur les flots la liberté d’adorer Dieu suivant leur conscience. Un règlement du 25 octobre 1685 défend de laisser faire à bord l’exercice de la religion prétendue réformée, à peine de cassation contre les capitaines des vaisseaux de guerre, et des galères contre les capitaines des vaisseaux marchands.
  5. Art. 4. Il assure plusieurs avantages aux ministres convertis, entre autres la dispense des trois années d’étude pour ceux qui voudraient se faire avocats.
  6. Art. 8.
  7. Art. 11.