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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/138

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CHAPITRE XIX.

La bulle Unigenitus.


La tyrannie paraît surtout odieuse quand elle se présente avec ce cortège de supplices et de victimes ; mais il est des persécutions sourdes, qui, pour être moins atroces, et pour passer en quelque sorte inaperçues, n’en sont pas moins des crimes contre la liberté. Louis XIV mettait les protestants aux galères, il les ruinait, il les tuait. Il était moins cruel pour les jansénistes ; il se contentait de les disgracier, de les exiler, de les emprisonner. Il gouvernait la conscience des catholiques les plus orthodoxes, comme auraient pu le faire un confesseur ou un évêque. Quand le roi, dans son conseil de conscience, avait adopté un avis sur une question de dogme ou de discipline, tous les sujets devaient se soumettre, à peine de passer pour rebelles et d’encourir son indignation. Il surveillait, dans sa cour, l’accomplissement des devoirs religieux, avec la sévérité d’un supérieur de couvent. Lui-même désignait le confesseur des personnes de sa famille[1] ; et ce

  1. « Le roi tenait sa famille dans une cruelle gêne pour la confession. Monseigneur n’a jamais eu un autre confesseur que celui du roi. Il n’était pas permis à ses enfants d’en prendre ailleurs que ceux qu’il leur donnait parmi les jésuites, et il fallait communier au moins cinq fois par an : Pâques, la Pentecôte, l’Assomption, la Toussaint et Noël, comme il faisait lui-même ; et Mme la duchesse de Bourgogne n’aurait pas eu