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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/191

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glise. On eût compris à la rigueur que le pape, se considérant comme l’unique pontife, eût transmis l’exercice local du pontificat à des pasteurs choisis par lui sous l’inspiration du Saint-Esprit : une telle doctrine, contraire à la tradition et féconde en abus, eût été du moins conforme au système du catholicisme ; mais que les princes dans leurs États fussent investis du droit de choisir les évêques, sous la seule condition de l’institution papale, c’était une organisation contraire à toute doctrine qui, dans la réalité, rendait un prince laïque dispensateur de l’autorité spirituelle. On ne peut nier que des rois nommant des évêques ne fussent un précédent tout fait pour l’Assemblée constituante ; elle aurait pu, sur ce précédent, nommer elle-même les évêques : elle faisait mieux, elle revenait à la tradition et aux principes en les rendant électifs. Mais l’absurdité de la constitution civile du clergé, quoique inférieure à l’absurdité des concordats, n’en était pas moins une absurdité.

Il faut dire aussi que le principe de l’élection était singulièrement appliqué. Par qui étaient nommés les évêques ? Parle conseil épiscopal ? Non. Par les évêques de France ? Non. Par le clergé, par les fidèles du diocèse ? Non : par les électeurs du département. Entendez bien que la carte d’électeur donnait droit également à nommer le représentant du peuple et l’évêque. Et pour obtenir cette carte et en user dans les élections religieuses, il n’était pas nécessaire d’être catholique. Les protestants étaient électeurs depuis le 24 décembre 1789, et les juifs le devinrent le 28.

Au reste, l’Assemblée était conséquente en cela. Elle faisait des lois d’organisation intérieure et de juridiction spirituelle pour l’Église catholique, sans être catholique ; elle pouvait donc, de la même façon, permettre à des protestants, à des juifs, de concourir à la nomination des pasteurs catholiques. Ces deux énormités tenaient à la même erreur. Seulement, après s’être ainsi transformée