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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/205

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tané. La Convention prononce, le 28 vendémiaire an II (19 octobre 1793), la peine de mort contre les prêtres déportés qui rentrent. Pour l’application de cette peine, il suffit que deux témoins attestent que le prévenu était sujet à la déportation. C’est le décret du 3 octobre, du 18 mars : la Convention se répète ; mais il y a chaque fois un perfectionnement. Si le prévenu communique le procès-verbal de la prestation de serment, l’accusateur public est autorisé à faire preuve, par pièces ou par témoins, que l’accusé a rétracté son serment ou a été condamné à la déportation pour cause d’incivisme. Les prêtres réfractaires demeurés en France et non déportés, tenus de se présenter dans la décade au directoire du département pour être immédiatement embarqués. Peine de mort contre ceux qui ne se présenteraient pas ; les receleurs, punis comme complices et de la même peine. Les sexagénaires et les infirmes condamnés, par faveur, à la réclusion : s’ils s’échappent, peine de mort.

Je sais ce que l’on peut alléguer pour la défense de la Convention. Il y a, dit-on, des circonstances fatales où la force des principes doit céder devant le péril imminent. De même qu’il est permis à l’individu de se faire homicide dans le cas de légitime défense, ne peut-il être permis à l’État d’oublier un moment la liberté quand il s’agit de son existence même ? Rome, qui était jalouse de ses droits, avait pourtant établi la dictature pour les circonstances extrêmes. Voilà ce que l’on dit, et l’on ajoute encore que quand les institutions d’un peuple ne sont pas complètes, quand elles sont trop jeunes pour être passées dans les mœurs, il a besoin du despotisme pour devenir capable de la liberté. Mais ces principes, il faut l’avouer, ne s’appliquaient pas à la liberté des cultes, contre laquelle la Convention avait des lois répressives : et d’ailleurs, malgré leur apparence de sagesse, l’histoire de tous les temps les rend suspects. Le despotisme n’a pas le droit de se présenter comme la condition d’une liberté future. Il ne fonde