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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/218

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mune, les Jacobins entendaient des rétractations qui luttaient entre elles de cynisme. Les protestants, les juifs, tous y passaient[1] ; tous voulaient se purger de cette lèpre de la prêtrise[2] ; les plus illustres eux-mêmes se paraient de leur apostasie[3]. On fut obligé d’autoriser par un dé-

  1. Commune de Paris, 22 brumaire an II (12 novembre 1793), Le Comité révolutionnaire de la section de la Réunion apporte au conseil général des croix, des soleils, des calices, des chapes, et quantité d’autres ornements de culte… Un membre du Comité rend hommage au patriotisme des citoyens ci-devant juifs qui demeurent dans l’arrondissement de cette section ; presque tous ont prévenu le vœu du Comité révolutionnaire en apportant eux-mêmes leurs reliquaires et leurs ornements, entre autres la rameuse chape qui, dit-on, a appartenu à Moïse. — Commune de Paris, 23 brumaire an II (13 novembre 1793). Des citoyens protestants déposent sur le bureau quatre coupes d’argent. « Le Président. Sous le règne de la philosophie, les préjugés disparaissent, la vérité luit, et, par un ascendant irrésistible, les hommes s’empressent d’abjurer leurs erreurs. Si une religion pouvait être conservée, ce serait celle qui approche le plus des principes de l’égalité… » Jullien de Toulouse avait dit aussi que le protestantisme était plus voisin que le catholicisme des principes de la Révolution. « On sait que les ministres du culte protestant n’étaient guère que des officiers de morale. » Gobel et lui plaidaient les circonstances atténuantes, Gobel pour lui-même, et Jullien pour son culte.
  2. Séance de la Convention du 24 brumaire an II (11 novembre 1793). Le premier vicaire épiscopal du département du Var écrit : « Je m’empresse de vous faire part de mon mariage avec la citoyenne Victoire. » — « C’est encore un ci-devant évêque constitutionnel, écrit Massieu, député de l’Oise, qui vient rendre à la saine raison un hommage public, en déclarant qu’il renonce à ses fonctions et à son traitement, et qu’il a fait choix d’une compagne riche en vertus. » — Le citoyen Arbant, ci-devant chanoine, fait hommage de ses lettres de prêtrise. — « Pour vivre libre et heureux, écrit le citoyen Bordin, il ne suffisait pas que le peuple n’eût plus de roi, il fallait aussi le délivrer de tout prêtre. » Il termine en déposant ses lettres de prêtrises, etc.
  3. Séance de la Convention du 20 brumaire an II (10 novembre 1793). « Sieyes. Citoyens, mes vœux appelaient depuis longtemps le triomphe de la raison sur la superstition et le fanatisme. Ce jour est arrivé ; je m’en réjouis comme d’un des plus grands bienfaits de la République française. Quoique j’aie déposé depuis un grand nombre d’années tout caractère ecclésiastique, qu’il me soit permis de profiter de la nouvelle occasion qui se présente pour déclarer encore, et cent fois, s’il le faut, que je ne connais d’autre culte que celui de la liberté, de l’égalité… J’ai vécu victime de la superstition, jamais je n’en ai été l’apôtre ou l’instrument. »