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Page:Jules Simon - La liberte de conscience, 1872.djvu/226

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tant de décrets rendus pendant la durée de la Convention sur le même objet, démontrent trop clairement qu’elle n’était ni pratiquée ni comprise.

Je ne parle pas des rigueurs dont les prêtres non assermentés furent l’objet, simplement en tant que réfractaires et qui allaient d’abord à la déportation, puis à la mort[1]. On pourrait croire que le refus du serment constituait aux yeux de la Convention un acte de rébellion, et qu’en frappant les prêtres réfractaires, elle entendait punir le mauvais citoyen, non le ministre du culte. Mais cette interprétation ne tient pas contre les faits. Elle multipliait trop les suspects, elle créait trop de délits, pour qu’on puisse avoir des doutes sur le but terrible qu’elle poursuivait. Après les orgies des hébertistes, elle laissa confondre les constitutionnels avec les réfractaires. La Commune de Paris la devançait, comme toujours. On y proposait l’arrestation en masse de tous les prêtres, par mesure de sécurité publique[2]. Un décret de la Commune prescrivait de fermer toutes les églises[3] ; un

  1. 29 et 30 vendémiaire an II. Ces décrets condemnent tous les prêtres réfractaires à la déportation, tous les déportés qui rentrent à la mort. « Dans le cas où le prévenu communiquerait le procès-verbal de la prestation de serment, l’accusateur public sera autorisé à faire preuve, tant par pièces que par témoins, que l’accusé a rétracté son serment, ou qu’il a été condamné à la déportation pour cause d’incivisme. »
  2. Séance de la Commune de Paris, 22 brumaire an II (12 novembre 1793). La section de la Fraternité demande, comme mesure de sûreté ; qu’on mette en état d’arrestation tous les prêtres, afin de prévenir toute tentative des fanatiques et autres contre-révolutionnaires.
  3. Séance de la Commune du 26 novembre 1793. « Chaumette. Les prêtres sont capables de tous les crimes. Je requiers que le conseil déclare qu’il est à sa connaissance que le peuple de Paris est mûr pour la raison, et que, s’il existe dans Paris quelques mouvements en faveur du fanatisme, tous les prêtres soient incarcérés… »
     Le conseil arrête : « 1o que toutes les églises ou temples de toute religion et de tout culte, qui ont existé à Paris, seront sur-le-champ fermés ; 2o que tous les prêtres ou ministres de quelque culte que ce soit demeureront personnellement et individuellement responsables de tous les troubles dont la source viendrait d’opinions religieuses ; 3o que celui qui demandera l’ouverture soit d’un temple, soit d’une église, soit arrêté