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Page:Koschwitz - Les Parlers Parisiens, 1896.pdf/10

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Le poète ne veut pas encore convenir de l’infériorité de son parler artésien. Mais les choses allèrent leur train. Aux 13e et 14e siècles, l’idiome de l’Île de France va se propageant de plus en plus, favorisé par les circonstances politiques; au 15e siècle, il est, sans conteste, la langue nationale, et les anciens dialectes sont rélégués au rang d’incultes patois, dédaignés par tous ceux qui s’élevaient, par leur instruction ou par leur position sociale, au-dessus de la misera plebs. Cependant, déjà à cette époque, on ne pouvait manquer d’observer que les Français de l’Île de France étaient bien loin de s’exprimer et de prononcer tous de la même manière: donc il fallait, dès ce temps, aller à la recherche de ce bon usage, que se sont acharnés à poursuivre, depuis, tous les grammairiens français, sans jamais pouvoir saisir cette fée Morgane qui, nécessairement, se dissout en nuéess, quand on s’en approche de trop près. Dès qu’il y a des grammairiens, il y a des controverses sur les modèles à suivre. Au 16e siècle[1], Tory (1529) affirme «que le stile de Parlement et de langage de court sont trés bons»; Palsgrave (1530), «Angloys, natyf de Londres et gradué de Paris», suit dans son Esclarcissement de la langue françoyse l’usage de Paris et des pays qui sont situés entre la Seine et la Loire, parce que c’est là que la langue française est le plus parfaite; Pelletier (1549) est «de l’opinion de ceus qui ont dit qu’an notre France n’i a androèt ou l’on parle pur françoès, fors la ou èt la court»; Guillame des Autels (1548) dit, au contraire: «onques ne me plut l’excuse d’vn langage corrompu, pour

  1. Nous suivons ici l’excellent exposé que Ch. Thurot a donné sur ce sujet: De la prononciation française etc., Paris 1881, I, LXXXVII, ss.