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Page:Kropotkine - La Grande Révolution.djvu/176

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de lods, plus de droits de ventes, de champart ; plus de corvée, plus de taille ! Plus de droit de chasse ! à bas les colombiers ! tout le gibier est à tout le monde. Plus de nobles, enfin, plus de privilégiés d’aucune sorte : tous égaux devant le juge élu par tous !

C’est ainsi, du moins, que fut comprise en province la nuit du 4 août ; et bien avant que les arrêtés du 5 et du 11 août eussent été rédigés par l’Assemblée, et que la ligne de démarcation entre ce qu’il fallait racheter et ce qui disparaissait dès ce jour eût été tracée, bien avant que ces actes et ces renonciations eussent été formulés en articles de lois, les courriers apportaient déjà au paysan la bonne nouvelle. Désormais, — qu’on le fusille ou non, — il ne voudra plus rien payer.

L’insurrection des paysans prend alors une force nouvelle. Elle se répand dans des provinces, comme la Bretagne, qui jusqu’alors étaient restées tranquilles. Et si les propriétaires réclament le payement de n’importe quelles redevances, les paysans s’emparent de leurs châteaux et brûlent tous les chartriers, tous les terriers. Ils ne veulent pas se soumettre aux décrets d’août et distinguer entre les droits rachetables et les droits abolis, dit Du Châtellier[1]. Partout, dans toute la France, les colombiers et le gibier sont détruits. On mangea alors à sa faim dans les villages. On mit la main sur les terres, jadis communales, accaparées par les seigneurs.

C’est alors que se produisit dans l’Est de la France ce phénomène qui dominera la Révolution pendant les

  1. Histoire de la Révolution dans les départements de l’ancienne Bretagne, 6 volumes, t. I, p. 422.