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Page:L’Œuvre du patricien de Venise Giorgio Baffo, 1910.djvu/277

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L’ŒUVRE DE GIORGIO BAFFO

Et derrière marchaient les bougresses
Qui se tiennent dans la Corte-delle-Colone ;
Celles des Case-Nuove
S’entendaient supplier Jupin,
Pour qu’en faveur de ce Saint
Elles eussent l’avantage
De jouir d’une bonne santé
Et de faire de l’argent plus que toutes.
Là, de tous les désespérés
S’entendaient les lamentations,
Mais plus que tous autres, les femmes
Qui restaient le bec essuyé,
Marchaient derrière pleurant,
Battant des mains et des pieds :
Telles se donnaient des coups de griffes,
Telles des pinçons sur le cul,
Telles s’arrachaient les cheveux,
Telles se pelaient la moniche,
Telles disaient : « Oh ! quel malheur
« Est arrivé à notre pertuis !
« Nous avons perdu un grand cas,
« Qui par l’endroit et par l’envers
« Avaient toujours bien mérité
« Du devant et du prétérit. »

Arrivés sur un parvis
Où se dressait un autel,
Elles le placèrent dessus,
Afin qu’à toutes fut permis
De pouvoir le bien contempler,
De le baiser, de le palper,
Dans l’espoir qu’en s’en signant
Elles pourraient se délivrer
De ce mal dont, un jour, la peste
A sur leur cul laissé les crêtes.