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Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 14.djvu/330

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ternir la gloire des armes de l’Espagne, et ne manquerait pas d’attirer la malédiction du ciel. Pour conclusion, ils appelaient du procès et de la sentence à la personne même de l’empereur ; et dans l’acte d’opposition et d’appel ils nommaient Jean d’Herrada pour protecteur de l’inca.

Ils ne se bornèrent point à faire cette déclaration de vive voix ; ils la donnèrent par écrit et la signifièrent aux juges, avec protestation contre les suites de la sentence. On n’épargna rien pour les effrayer ; ceux qui avaient le pouvoir en main menacèrent de les traduire à la cour, comme des traîtres qui s’opposaient à l’agrandissement de leur patrie ; et, mêlant la persuasion aux menaces, ils s’efforçaient de leur faire entendre que la mort d’un seul homme assurait leur vie et leur conquête ; au lieu que, pendant qu’il subsisterait, l’une et l’autre seraient en danger. La dissension alla si loin, qu’elle aurait produit une rupture ouverte, si quelques esprits modérés n’eussent entrepris d’arrêter les plus ardens. Ils représentèrent aux partisans de l’inca que, l’intérêt de l’empereur et de la nation étant mêlé dans cette affaire, ils entreprenaient trop à s’y opposer, et qu’outre les suites fâcheuses de leur opposition du côté de l’Espagne, ils hasardaient leur vie à pure perte, puisque, étant en si petit nombre, ils ne sauveraient point celle de l’inca. Ce dernier raisonnement, qui était sans réplique, les força