Aller au contenu

Page:La Harpe - Abrégé de l’histoire générale des voyages, tome 18.djvu/251

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

prisans de tous les mortels, et ceux qui s’estiment le plus ; ils sont esclaves du respect humain, légers, inconstans, soupçonneux à l’égard des Européens, traîtres lorsqu’il est question de leur intérêt, dissimulés et vindicatifs à l’excès. La vengeance est une passion que le temps ne ralentit point dans leur âme : c’est le plus cher héritage qu’ils laissent à leurs enfans ; il passe de génération en génération, jusqu’à ce que la race offensée trouve l’occasion d’assouvir sa haine. Le soin qu’ils prennent des orphelins, des veuves et des infirmes, l’hospitalité qu’ils exercent d’une manière admirable, ne sont pour eux qu’une suite de la persuasion où ils sont que tout doit être commun entre les hommes. Les pères et les mères ont pour leurs enfans une tendresse d’affection qui va jusqu’à la faiblesse, mais qui est, dit-on, purement animale. Les enfans, de leur côté, n’ont aucun retour naturel pour leurs parens, et les traitent quelquefois avec indignité. Entre plusieurs exemples, on raconte qu’un Iroquois qui avait servi long-temps dans nos troupes en qualité d’officier, rencontra son père dans un combat, et l’allait percer, lorsque le père se fit reconnaître. Il s’arrêta et lui dit : « Tu m’as donné une fois la vie ; je te la donne à mon tour : mais ne te retrouve pas une autre fois sous ma main ; car je suis quitte de ce que je te devais. »

Chacun se fait un ami à peu près du même âge, auquel il s’attache, et qui s’attache à lui par des nœuds indissolubles. Deux hommes