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Page:La Revue du Mois, tome 0, 1905.djvu/4

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LA REVUE DU MOIS

tient dans les deux facteurs suivants : la qualité des troupes et la valeur du commandement.

Bien que présentant une réelle importance, la question des matériels en usage dans les deux camps n’exerce qu’une influence secondaire sur les opérations d’une campagne : l’histoire le prouve.

À Sadowa, l’Autriche possédait une artillerie supérieure à celle de la Prusse : elle n’en fut pas moins battue et ce serait bien à tort que l’on ferait remonter au fusil Dreyse du vainqueur le mérite de la victoire car, en 1870, notre Chassepot, l’arme la meilleure pour l’époque, ne nous a pas épargné l’humiliation de la défaite. Il est vrai que le canon allemand était, en revanche, préférable au nôtre, mais les Prussiens, quatre ans plus tôt, s’étaient précisément chargés de démontrer que l’on peut vaincre avec un matériel d’artillerie moins perfectionné que celui de l’adversaire.

Ce serait donc une erreur de vouloir imputer à la valeur de son armement la cause initiale des succès ou des revers d’une armée.

La qualité de nos troupes a, dans ces dernières années, servi de thème à de nombreuses discussions.

On ne saurait nier que l’influence des théoriciens qui s’obstinent à vouloir ignorer que la loi de l’évolution régit lentement la destinée des peuples comme celle des espèces, ne se soit exercée, avec succès et dans un sens contraire à l’instinct guerrier et patriotique, sur quelques individualités, mais la masse n’a pas été touchée par les idéologies nouvelles[1] et le soldat français demeure encore le premier de l’Europe.

Plus vif, plus alerte, plus intelligent, plus endurant que tous les autres parce qu’il a plus d’amour-propre, il est particulièrement apte au combat en ordre dispersé, qui constitue la base de la bataille moderne.

Livré à lui-même, éloigné du regard de son chef, il trouve d’instinct l’emplacement d’où il nuira le plus à l’adversaire

  1. Il est loin de notre pensée de vouloir, en employant ce mot, faire injure aux personnalités qui s’efforcent de bonne foi à supprimer la guerre, mais il est permis de croire que les temps ne sont pas encore révolus qui verront s’ouvrir l’ère de la fraternité universelle.