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Page:La Revue du Mois, tome 0, 1905.djvu/5

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LE HAUT COMMANDEMENT DANS L’ARMÉE FRANÇAISE

sans s’exposer personnellement et, dans la course rapide qui le porte vers l’avant, il a déjà vu la nouvelle place où il s’embusquera pour faire usage de son arme : il réalise, en un mot, le type du tirailleur.

Ses qualités morales sont si connues qu’il paraît presque inutile de les rappeler : ardent, d’enthousiasme facile, sensible aux nobles paroles, exalté par l’exemple, le Français est un merveilleux instrument de combat entre les mains de chefs habiles ayant su gagner sa confiance.

Mais s’il est capable des plus grandes actions lorsque son moral est surexcité, il est aussi très impressionnable.

Facilement accessible au découragement, les revers l’abattent et c’est un fait d’expérience qu’aux heures sombres de notre histoire, il a toujours instinctivement rejeté la responsabilité des événements malheureux sur les chefs de grade élevé qui le commandaient.

En cela, il ne faisait que proclamer inconsciemment cette vérité — plus vraie en France que partout ailleurs — à savoir que la force principale d’une armée n’est pas toute dans la discipline mais, pour une large part, dans la valeur morale et professionnelle de son haut commandement.

Avec des troupes que leur indiscipline réelle ou leur manque d’éducation militaire faisaient médiocres, Napoléon souvent remporta la victoire, mais Napoléon était un homme de génie et ses soldats avaient foi en lui.

En ce qui concerne l’ardeur et l’expérience guerrière, nous avions, au début de la campagne de 1870, des troupes telles qu’il ne nous est plus permis d’espérer en avoir désormais : malgré cela, il serait trop facile et trop long d’écrire le livre des occasions perdues, dans cette guerre néfaste, par un haut commandement inférieur à sa tâche.

En l’état actuel des choses, avec son esprit de patriotisme, avec le développement d’une discipline qui pour être plus consciente n’en est que plus sûre, l’armée ne laisse rien à désirer sous le rapport de la qualité des troupes : elle vaut ce que vaut son haut commandement.

Tout chef doit s’efforcer de réunir les trois qualités sui-