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Page:La Vérité sur Tahiti - Affaire de la Roncière.djvu/28

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colonie, qui est le premier à inviter les habitants à s’occuper de leurs affaires, qui refuse d’appliquer les vieux règlements, ces colonnes de la bureaucratie !… La bureaucratie lui prouvera qu’elle doit avoir toujours le dernier mot…

M. de la Roncière a conservé un amer souvenir de son passé ; aussi, craignant toujours de se tromper, s’était-il rendu accessible, sans demande d’audience, au fonctionnaire le plus élevé de la colonie, comme aux plus pauvres des ouvriers et colons du pays.

Assis dans son cabinet, au rez-de-chaussée de son hôtel, seul, sans secrétaire particulier, sans valet introducteur, sans factionnaire vous barrant le passage, dès huit heures du matin il recevait avec une simplicité tout américaine tous ceux qui se présentaient, dans l’ordre de leur arrivée… Et voici comment cela se passait. Quelqu’un frappait : « Entrez ! » disait M. de la Roncière.

« Qui êtes-vous ? que me voulez-vous ? — Mon commandant, répondait par exemple un soldat, vu l’insuffisance de notre nourriture dans un pays où les vivres frais sont si rares, vous avez ordonné la création d’un potager pour la troupe. — Je le sais : eh bien ! est-ce que vous n’êtes pas content de cette mesure ? — Pardonnez-moi, commandant. — Que désirez-vous alors ? — Je suis envoyé par les camarades pour vous dire que les légumes que nous cultivons prennent une autre direction que celle de notre marmite. — C’est bien, répondait M. de la Roncière, je vais prendre des mesures pour inculquer à ces légumes vagabonds l’amour de la ligne droite (historique). » Les légumes reprenaient, en effet, leur direction légale… mais que de petites haines, que d’esprits prêts pour toutes les dénonciations anonymes !…

Une autre fois, c’était un ouvrier, un petit cultivateur, qui