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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/115

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

déchirement, un effondrement total… Et pourtant, je n’éprouve ni colère, ni indignation. Je n’ai même pas rougi. Faut-il que je sois déjà mûre !

Ainsi, il m’a pris pour une fille, pour une catin, et il a payé… Eh bien ! en y réfléchissant, il a eu raison, ce garçon. Pouvait-il se douter ? Est-ce que de Cère aurait jamais oublié de laisser un cadeau à Cécilia ? La seule différence, c’est que de Cère payait cinquante louis ce qui en coûtait deux à Lucien. Et c’est encore Lucien qui avait été le mieux partagé.

En somme, je ne suis pas étonnée outre mesure. Ça devait arriver. Maintenant, je ne m’étonne plus de rien, et je m’enfonce toujours davantage dans ma fatalité. Ça devait arriver ! C’était écrit ! À quoi bon lutter contre l’inéluctable.

Et sans dégoût, j’ai mis les deux louis dans ma bourse.

Mon amant m’assomme et j’assomme mon amant. Nous nous sommes dit cela très gentiment, l’autre soir, entre deux sorbets, cependant que Cécilia se laissait conter des cochonneries par un grand général en retraite.