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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/171

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

des salles pleines de souffrance, une sorte d’apaisement après les douleurs lancinantes de la journée. Au delà, la grande ville bourdonne sourdement, dans le frôlement gigantesque du peuple, et, par endroits, des lueurs plus intenses indiquent l’emplacement des lieux de plaisir où la foule se rue. Il fait bon, il fait doux ; le grand calme m’endort.

Ah ! cette première journée ! Dès six heures, j’attendais à la porte de l’hôpital. Des gens passaient, à pas rapides, pressés par l’heure. Quand la porte s’ouvrit, cela me fit l’effet d’une chute dans un inconnu délicieux. N’étais-je pas un peu comme le pécheur qui attend à la porte du Paradis et qui entre enfin dans le séjour éternel du bonheur parfait.

Le gardien me conduisit aussitôt à la salle Rayer où j’étais affectée ; la plupart des malades dormaient encore ; d’autres s’étiraient en bâillant.

Pierre, le garçon, me prit de suite sous sa haute direction, en attendant la surveillante.

— Ah, c’est toi, la nouvelle. Tiens, v’la ta blouse et ton tablier ; passe-les par-dessus tes frusques. Tu t’arrangeras demain.

Je fus prête en un tour de main. À l’autre