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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/63

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

— Si, si, général, après, tout à l’heure.

Prenant la main d’Alexis qui trottinait en grande hâte, le général se fraya un passage au travers de la foule des invités, jusqu’à une vaste salle où une armée de laquais apprêtaient les meilleures choses du monde. Moi, je suivais mes élèves en souriant à l’officier qui avait mille peine à garder son sérieux.

D’immenses tables pliaient sous l’avalanche des plats qui s’étageaient en un désordre pittoresque. Les zakouskis nationales occupaient la place d’honneur ; une infinie variété de poissons frais et fumés attendaient le moment de disparaître dans les bouches avides des danseurs ; d’énormes quartiers de viandes rôties montraient des flancs dorés où s’accrochaient des verdures ; une armée d’oies, de dindes, de poulets et de faisans dressaient des crêtes folles dans un épanouissement de leur plumage ; des têtes de veau, des hures gardaient à la gueule l’or dur des oranges ou la boule noire des truffes.

Et les pâtisseries débordaient de partout ; un flot de crèmes s’épandait, sur une nappe de petites choses précieuses et colorées ; les fours, les éclairs, les choux, les fruits confits, les