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Page:La Vrille - Le journal d’une masseuse, 1906.djvu/64

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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

compotes, les confitures, les poires, les pommes, les raisins, les bananes, les ananas, se mêlaient, se confondaient en un débordement gigantesque, cependant qu’ailleurs la forêt des bouteilles de vins rares, de liqueurs superfines, de champagne et de wodka nationale, emplissait l’air de reflets multicolores, où prédominait l’or merveilleux des sect et des extra-dry carte blanche et carte bleue, l’opale tendre des eaux-de-vie allemandes, le rubis des médocs des pomards, l’or pâle des chartreuses, le vert profond des bénédictines enfermées dans leurs flacons scellés, et la limpidité de source des wodkas et des kümmels.

Une odeur forte emplissait l’air, faite de tous les parfums qui s’élevaient de cette énorme quantité de mangeaille. Et les laquais s’agitaient fiévreusement, sous l’œil furibond d’un majordome sévère, en habit, qui ressemblait à Félix Faure, moins la Légion d’honneur.

Serge et Alexis s’étaient précipités vers le coin aux pâtisseries, en entraînant le général qui riait de tout son cœur. Je comprenais maintenant pourquoi les petits coquins n’avaient rien mangé à dîner. Ils s’étaient ré-