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LE JOURNAL D’UNE MASSEUSE

Un orchestre caché derrière les larges palmes d’un bosquet, au fond d’un salon latéral, jouait des csardas au rythme endiablé, de langoureuses valses lentes, des kosatschok précipités, des fantaisies et des fragments d’opéras, et les mélodies s’égrenaient dans le vaste hall ainsi qu’une brise lointaine chargée de modulations tendres, au milieu du bruit de la foule indifférente.

Le général qui nous guidait fit signe à un aide de camp ; celui-ci s’approcha aussitôt, et s’inclina devant les petits princes ; puis faisant demi-tour, il fendit les groupes et nous conduisit au fond de la salle, près du trône. Les deux enfants saluèrent très bas, avec une gravité comique, le tsar qui leur souriait, et ils se jetèrent aux pieds de la tsarine en baisant ses mains, dans leur joie de la revoir. Je m’étais inclinée, timide et rougissante devant Sa Majesté qui m’adressa la parole avec bienveillance :

— Est-ce qu’ils sont gentils, mademoiselle, est-ce qu’ils aiment bien leur mamachtchka ?

— Oh oui, Majesté ; ils l’adorent.

— C’est bien, cela, Serge. Et toi, mon gros, dit-elle à Alexis, comment va mamacha ?