je repris gaiement le chemin de mon village.
Mais quelle fut ma surprise ! À peine
avais-je fait une demie lieue, que j’aperçois
ce jeune homme venant au-devant
de moi : Me reconnaissez-vous, dit-il en
me serrant dans ses bras pour m’embrasser.
Ma réponse fut un cri affreux ; je voulus
m’esquiver, mais inutilement : il me
retint, et me dit qu’il m’aimait à l’adoration,
et qu’il ne demandait de ma part
qu’un peu de retour.
Je n’entendais rien à tout ce beau langage, et je le laissai continuer son jargon tout à son aise ; je sentais néanmoins un certain plaisir à l’entendre ; je le priai cependant de me quitter ; il ne me le promit qu’à condition que je lui laisserai prendre un baiser, il fallut en passer par là. Et ce fut sur la bouche, avec un feu inexplicable ; il redoubla même malgré mes efforts. Enfin il me quitta les larmes aux yeux. Tout le chemin, je réfléchis sur ce qui venait de m’arriver : les baisers que j’avais reçus m’avaient beaucoup échauffé ; je ne savais comment et pourquoi je ressentait une joie secrète dans le fond de mon cœur. Le seul souvenir de ces