Aller au contenu

Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/131

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

divinité elle-même[1] !… De tous ces jeux d’esprit, dont la pseudo-science d’un Pline l’Ancien, d’un Plutarque et d’un Élien fournit les éléments, Origène démontre assez habilement l’inanité, soit en signalant les manques de méthode de Celse, soit en opposant aux spontanéités de l’instinct les démarches réfléchies de la raison[2].

Et, d’autre part, il n’est guère d’intelligence moins unifiée que l’intelligence de Celse. C’est dans une atmosphère d’intime contradiction qu’elle opère et qu’elle vit. Il a des déclarations radicales, des questions ironiques, qui impliquent un scepticisme aigu à l’endroit de la religion païenne traditionnelle : « Jamais un dieu, jamais un fils de dieu n’est descendu sur la terre, ni ne peut y descendre[3]. » « Un point à examiner, c’est si jamais mort réellement mort est ressuscité avec le même corps[4]. » On a remarqué la prudence de ses formules, dès qu’il hasarde une affirmation relative aux mythes gréco-romains. Il évite en pareil cas le « je », dont volontiers il se sert dans le domaine proprement philosophique, et il se réfugie derrière les expressions les moins compromettantes qu’il peut trouver. Origène a bien senti les doutes inavoués dont Celse était travaillé, et il note avec quelles précautions rusées celui-ci omet de se prononcer sur le compte des dieux, soit pour conseiller aux autres de les adorer comme tels, soit pour éluder toute profession de foi personnelle[5].

  1. IV, 77-99.
  2. IV, 89. Il y aurait une comparaison curieuse à faire entre cette partie de l’ouvrage de Celse et les développements parallèles de l’Apologie de Raymond de Sebonde, de Montaigne (édit. Villey, t. II [1922], p. 161-211). Montaigne ne connaissait pas l’œuvre de Celse.
  3. V, 2.
  4. II, 55.
  5. III, 22.