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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/136

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en tant que destructeur de la vie civique et de la vie religieuse. Dirons-nous que sur ce point la bonne foi coutumière d’Origène a subi une légère éclipse[1] ? Il est plus juste de reconnaître que certaines déclarations sceptiques de Celse pouvaient l’incliner à subodorer chez celui-ci des accointances avec l’épicurisme. Eugène de Faye n’a-t-il pas reconnu que Celse « est imbu jusqu’aux moelles de l’esprit d’Épicure[2] » ? Cependant, à mesure qu’Origène étudiait le Λόγος Ἀληθής, des raisons de douter de son impression première durent s’insinuer dans son esprit. Il y entendait un accent de piété, des affirmations réitérées de la sollicitude que Dieu exerce, sinon sur l’homme en particulier (Celse n’admettait pas cette forme spéciale de l’action providentielle), du moins sur l’ensemble du Cosmos[3]. Celse ne célébrait-il pas l’harmonie de l’univers, l’heureux accord des parties avec le tout ? « Ce tout », avait-il écrit, « c’est Dieu qui en a souci et jamais sa Providence ne le néglige[4]. » — Au surplus, le souci que manifestait Celse au sujet des lois de l’État, des destinées de l’Empire, ses exhortations patriotiques à l’adresse des chrétiens, tout cela formait contraste avec l’indifférence bien connue des épicuriens pour la chose publique. — Origène pouvait enfin constater que Celse ne citait explicitement aucune des maximes d’Épicure, alors qu’il se prévalait une quinzaine de fois de textes empruntés au Criton, à l’Apologie de Socrate, au Phédon, au Théétète, au Phèdre, au Timée et aux Lettres de Platon ? Il est bien obligé de constater l’importance de

  1. Tel est l’avis de Wilamowitz-Moellendorff : cf. Deutsche Literaturzeitung, 1927, p. 103.
  2. Origène, sa Vie, son Œuvre, sa Pensée, t. II, Paris, 1927, p. 186.
  3. Voy. IV, 4, 63 ; V, 3.
  4. IV, 99.