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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/140

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des siècles ferment de disputes et pierre de scandale pour les esprits les plus éminents et aussi pour les tempéraments les plus bornés, on l’imaginerait volontiers comme un pur intellectuel promenant sa curiosité, au fond assez détachée, dans le domaine de l’exégèse et du dogme, en y cherchant seulement un appui, ou un abri spécieux, pour ses combinaisons personnelles et ses rêves métaphysiques. Erreur complète ! Les sources vives n’étaient pas taries dans l’âme d’Origène. Il est un chrétien fervent, à qui les objets de sa foi inspirent la confiance, l’enthousiasme, l’amour.

Il y a tout d’abord un argument qui rassure pleinement sa raison : c’est l’argument des prophéties. Certes, il n’est pas le premier à le mettre en valeur : les apologistes du second siècle en avaient déjà tiré grand parti. Mais il admire plus qu’aucun autre l’adaptation des mystérieuses annonces de l’Ancien Testament aux réalités qu’elles ont préfigurées, et il fait grief à Celse de s’être contenté de rejeter en bloc ces correspondances frappantes, au lieu de les discuter dans leur détail pour les déceler inopérantes, s’il croyait pouvoir y réussir.

Au surplus, c’est son cœur même qui appartient tout entier à sa croyance.

À l’égard du Christ, il est personnellement de ces fidèles dont il parle dans un de ses Commentaires « qui tenero erga Iesum tenentur affectu[1] ». Laissons pour l’instant ses spéculations sur le rapport du Christ au Père : elles trahissent, comme on sait, un « subordonnationisme » très marqué[2], encore qu’il maintienne nettement que le Fils

  1. Comm. sur l’Ép. aux Rom., V, 10 (nous n’avons ce commentaire que dans la traduction latine de Rufin).
  2. V, 4 ; VII, 57 ; VIII, 1, 12, 13, 14-17, 26, 67, 69.