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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/185

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dont Jésus s’était volontiers servi. C’est ainsi que, pour engager ses auditeurs à pratiquer la morale de l’entr’aide, Apollonius leur raconte l’histoire d’un enfant qui, portant du blé dans un panier, tombe et en laisse choir à terre le contenu. Il ramasse son blé tant bien que mal ; une certaine quantité de grains restent épars ; un moineau les aperçoit et va chercher ses congénères pour profiter de la bonne aubaine. Pareillement « les hommes doivent nourrir les hommes et être nourris par les hommes ». Il est difficile de ne pas reconnaître dans cette anecdote instructive une sorte de parabole, avec cette différence qu’elle n’est pas fictive : c’est un fait réel, qui se déroule non loin de là. Apollonius le connaît grâce à son don de double vue, et ses auditeurs vont immédiatement le contrôler.

VII

Ces similitudes obligent à admettre que Philostrate a connu et exploité les Livres Saints.

Un esprit aussi cultivé ne pouvait guère ignorer les progrès de la secte chrétienne, l’extension qu’elle était en train de prendre dans toutes les parties de l’Empire, la grande réputation de certains de ses protagonistes. Au surplus, la nièce de Julia Domna, Julia Mamaea, mère du futur empereur Alexandre-Sévère, s’intéressait vivement aux choses du christianisme. Eusèbe de Césarée la décore de l’épithète de θεσσεβεστάτη, qui ne saurait d’ailleurs signifier autre chose que « très pieuse[1] ». Une légende, qui fit rapidement

  1. Hist. Eccl., vi, 21, 3. Cf. K. Bihlmeyer, die Syrische Kaiser, Rottenburg a. N., 1916.