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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/195

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et les Juifs, un certain Zabidos, de la ville de Dora (selon Schürer, il s’agit d’Adora, en Idumée[1]), où Apollon était honoré, vint trouver les Juifs et leur promit que le dieu se livrerait de lui-même à eux, en se transportant jusqu’au Temple de Jérusalem, s’ils consentaient à s’éloigner de Dora. On le crut. Dissimulé dans un appareil en bois tout constellé de lumières, Zabidos pénétra sans être inquiété dans le temple sous les yeux écarquillés des Juifs : « il enleva la tête d’or du baudet » (τὴν χρυσῆν ἀποσῦραι τοῦ κάνθωνος κεφαλήν) et s’en revint promptement à Dora[2].

Tel est le premier texte où la légende du culte de l’âne soit mentionnée.

Un siècle plus tard, nous la rencontrons dans divers pamphlets anti-juifs, chez le rhéteur Apollonius Molon[3], qui fut un des maîtres de Cicéron, chez Posidonios d’Apamée[4], chez Damocrite[5], chez le grammairien alexandrin Apion[6] (que Tacite a peut-être utilisé dans son excursus sur les Juifs, au Ve livre des Histoires).

Pendant trois siècles au moins, la légende courut donc sur le compte des Juifs, dans les diverses parties du monde romain. D’où une semblable imagination avait-elle pu naître, c’est ce que les critiques se sont évertués à démêler, sans y réussir d’une façon tout à fait satisfaisante[7].

Quoi qu’il en soit, après avoir longtemps pesé sur les

  1. Gesch. des Jud. Volkes, t. III, 4e éd., p. 532.
  2. Reinach, p. 49.
  3. Reinach, p. 62.
  4. Ibid., p. 56.
  5. P. 121.
  6. P. 131.
  7. Voy. en dernier lieu Ad. Jacoby, Der angebliche Eselskult der Juden und Christen, dans l’Archiv. f. Religionswiss., t. XXV (1927), p. 265-282.