Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/273

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Ce sont là des imaginations, dignes, je ne dirai pas d’hommes, mais non pas même de femmelettes perdues de rêves. Quand on se mêle de parler de grands sujets, de sujets divins, encore faut-il, pour les rendre accessibles, user de moyens usuels, humains, et non pas de ces procédés si grossiers et incompréhensibles… Jamais pourtant la clarté n’eût été plus nécessaire, puisque tout cela est écrit, non pas pour les sages et les gens d’esprit, mais pour les petits enfants[1].

La prétendue « monarchie » chrétienne n’est qu’un polythéisme déguisé. D’abord, Dieu ne peut être vraiment « monarque » que s’il règne sur des êtres de même nature et de même espèce, c’est-à-dire sur d’autres dieux[2]. En fait, la façon dont les chrétiens définissent les anges — impassibles, immortels, incorruptibles — oblige à conclure que ce sont aussi des dieux. Il n’y a là qu’une question de mots, de dénomination (de même que les Grecs disent Athénè, les Latins Minerva). Leur essence est certainement divine. La réponse du Christ aux Sadducéens[3] le laisse clairement entendre[4]. À cette affirmation, Porphyre lie d’une façon un peu artificielle une apologie assez raisonnable des statues païennes. On sait qu’il avait largement développé ailleurs ses arguments[5]. Une statue, observe-t-il, c’est un memento pour le fidèle et un témoignage de respect : rien de plus. Les artistes donnent aux dieux la forme humaine, parce que l’homme est le plus beau des êtres vivants. Moïse lui-même ne parle-t-il pas du « doigt » de Dieu, dans l’Exode[6]. Et voici où Porphyre veut en venir :

  1. Fragm. no 54.
  2. Fragm. no 75.
  3. Matth., XXII, 20-30.
  4. Fragm. no 76 ; cf. no 78.
  5. Voir plus haut, p. 238.
  6. XXXI, 18. — Fragm. no 76.