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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/347

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étrangers à l’histoire de l’humanité classique, et exposées des idées si différentes des conceptions philosophiques coutumières, ils éprouvaient un sentiment de répulsion très prononcé, où il y avait à la fois de l’ahurissement, du dédain et du découragement. La Bible était pour eux un livre fermé, obscur à la fois pour le fond et pour la forme[1]. » Saint Augustin lui-même, non encore converti, mais qui avait reçu une éducation chrétienne, nous a confié à quel point il fut rebuté, quand déjà plein de zèle pour la vie de l’esprit, il essaya d’approfondir les Écritures[2] ; et nous avons, de saint Jérôme, des aveux analogues[3]. — On comprend, à ce prix, les résistances païennes et la vivacité avec laquelle elles éclataient quelquefois[4].

Nul doute, enfin, que certaines maximes chrétiennes, en raison même du ton sur lequel elles s’affirmaient, ne dussent paraître inquiétantes pour l’avenir de l’État et l’autorité des parents. Quand saint Ambroise, porte-parole du concile d’Aquilée, écrivait à l’empereur Gratien « … reverentiam primum ecclesiæ catholicæ, deinde etiam legibus vestris deferri[5] », une subordination grosse de conséquences dessinait déjà sa menace. Quand le même Ambroise invitait les jeunes filles tentées par la vie religieuse à triompher coûte que coûte de la résistance des leurs[6] ; quand saint Jérôme, imitant sans le dire un trait de Sénèque le rhéteur, exhortait un jeune ami à fouler au besoin le corps de son

  1. Cavallera, dans le Bulletin de Litt. Ecclés. de Toulouse, 1921, p. 214.
  2. Conf. III, 5.
  3. Ép. 22, 30.
  4. Citons seulement les propos dont l’apologiste Arnobe se fait l’écho, Adv. Nation., I, 59 « Barbarismis, soloecismis obsitae sunt res vestrae et vitiorum deformitate pollutao ». Cf. I, 45 ; I, 58 ; celui de saint Jérôme, Chroniq., Préf. (éd. Helm, p. 3) ; d’Augustin, de Catech. Rudibus, IX.
  5. Ép. x, 12.
  6. Dans le De Virginibus et le De Virginitate.