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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/360

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X

Marius Victorinus est bien connu, grâce à la façon si vivante dont saint Augustin a raconté au VIIIe livre de ses Confessions comment ce rhéteur fameux se convertit. Né en Afrique proconsulaire vers 300, Victorinus exerçait à Rome son métier. Il passait pour un des hommes les plus savants et les plus éloquents de son temps. Il avait même accepté qu’on lui élevât une statue sur le Forum romanum (ou peut-être sur le Forum de Trajan).

Il mettait au service du paganisme menacé sa parole formidable ; — saint Augustin, pour en caractériser la puissance, n’hésite pas à créer un mot nouveau : ore terricrepo. Il n’épargnait pas aux chrétiens, en dépit d’une certaine aménité naturelle qu’il devait garder toute sa vie, des coups de boutoir du genre de celui-ci. Le passage est d’autant plus frappant qu’il surgit inopinément, au milieu d’un exposé paisible sur les « arguments », considérés du point de vue de la rhétorique[1].

Un argument est nécessaire, quand il ne peut être formulé ni démontré autrement qu’il ne l’est effectivement. Un argument néces-

    de Droit français et étr., 1930, p. 669-701) que les Constitutions des empereurs chrétiens, tout au long du ive s. (jusqu’en 395), n’auraient eu pour but que de faire obstacle à l’accomplissement des rites magiques, et non de proscrire l’ancienne religion. On peut contester l’interprétation qu’il donne du mot superstitio, lequel ne désignerait pas dans la langue juridique le culte des idoles. Ce qui est sûr, c’est que, du côté païen, on imputait à ces empereurs des intentions moins inoffensives.

  1. In rheloricam M. Tulli Ciceronis libro duo, i, 29 (dans Halm, Rhetores latini minores, Leipzig, 1863, p. 232, l. 30 et s.). « … Alioqui secundum Christianorum opinionem non est necessarium argumentum : « Si peperit, cum viro concubuit » neque hoc rursus « si natus est, morietur » .Nam aput eos, manifestum est sine viro natum et non mortuum. »