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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/386

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nuellement : or Grégoire de Nazianze, qui avait connu le prince pendant quelques mois, au temps où celui-ci parachevait à Athènes sa formation philosophique, notait déjà chez lui une certaine impulsivité, une nervosité que trahissaient son apparence physique et ses gestes[1].

Il y devint, non seulement un croyant (il l’était déjà depuis longtemps), mais un illuminé et même un fanatique, d’une religiosité un peu maladive. À la sécheresse des élucubrations de l’école de Jamblique, il associa les élans intimes d’une sensibilité vibrante. Il s’éprit d’amour pour les dieux délaissés, pour le vieux paganisme en train de mourir, et il s’en constitua le prêtre et l’apôtre. Ses contemporains citent nombre de témoignages où éclate sa dévotion personnelle et l’intensité de sa pratique religieuse. Il supportait « joyeusement » des jeûnes variés, « selon le dieu dont il célébrait le culte, Pan, Hermès, Hécate, Isis et tous les autres », pensant pouvoir plus aisément jouir ainsi « du commerce des dieux[2] ». De vie sobre et mortifiée, le divin pénétrait constamment sa pensée et ses actes. Il fréquentait assidûment les temples, se détournant au besoin de sa route, au cours de ses voyages et de ses expéditions, pour visiter tel sanctuaire illustre[3].

Il s’était, d’ailleurs, fait une règle d’offrir, presque chaque jour, un double sacrifice, un le matin, l’autre le soir[4]. « Nous adorons les dieux, écrivait-il à Maxime pendant

  1. Oratio, V, 23-24 ; Patrol. gr., 35, 692.
  2. Libanius, Or., XVIII (Förster, t. II, p. 310, l. 9 et s.).
  3. Par exemple pendant son trajet de Constantinople à Antioche, il poussa une pointe vers Pessinus pour y vénérer le temple de Cybèle (visurus Matris magnae delubra : Ammien Marcellin, XXII, ix, 5) ; d’Antioche, il se rendit au temple de Jupiter sur le Mont Cassius (ibid., XXII, xiv, 4), etc. Sa lettre à Libanius (Bidez, p. 180) où il raconte son voyage dans le nord de la Syrie le montre obsédé de pèlerinages et d’immolations.
  4. Ép. 48 (Bidez, p. 182, l. 13).