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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/414

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être pervers soi-même pour s’attendrir sur les pervers[1]. Ailleurs, à propos de la prédiction du Christ dans saint Matthieu[2] : « Le frère livrera le frère à la mort, et le père, le fils, etc. », il demandait : « Comment donc le Logos de Dieu supprime-t-il le péché si, au contraire, il devient responsable de tant de meurtres commis par les fils sur les pères, par les pères sur les fils ? Or, les hommes sont obligés, ou bien de défendre les coutumes de leurs ancêtres, de s’attacher aux pieuses traditions héritées des âges[3], ou bien d’accepter ces principes nouveaux. Ne pourrait-on, d’ailleurs, en dire autant de Moïse, venu pour supprimer le péché, et dont on découvre qu’il l’a multiplié[4] ? »

Quant à sa mort, elle fut une mort honteuse, indigne d’un Dieu, la mort sur la croix[5]. Les circonstances de sa passion sont dégradantes et d’ailleurs mal établies. Les plaintes que Luc lui prête[6] sont d’un malheureux qui se sent incapable de supporter avec sérénité son infortune. Il faut qu’un ange vienne le consoler, lui, un Dieu ! Mais qui l’a vu, cet ange, puisque les disciples dormaient ? Jean, lui, n’a pas osé parler de cet ange, parce qu’il ne l’avait pas vu[7].

Le récit de la résurrection souffre aussi maintes difficultés. Ainsi, selon saint Matthieu, Marie-Madeleine et la seconde Marie vinrent au sépulcre, après le sabbat, à l’aube

  1. P. 236, 30.
  2. X, 21. Il visait aussi le Prologue de saint Jean, I, 29, là où il est dit de l’Agneau qu’il « enlève les péchés du monde ».
  3. C’est-à-dire de rester païens, ce qui est péché aux yeux des chrétiens.
  4. Par les prescriptions minutieuses de sa Loi. Ce fragment ne figure pas dans l’édition Neumann. Neumann l’a reconstitué d’après les données de Bidez et Cumont dans la Theolog. Literaturzeitung, de 1849, col. 301, en utilisant un fragment de l’archevêque Arethas de Césarée (xe siècle) inclus dans un manuscrit du xvie siècle de la Bibliothèque du Synode, à Moscou, no 441.
  5. P. 196, 10.
  6. Luc, XXII, 4.
  7. Neumann, p. 235, 12 et s.