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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/471

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en Gaule, où l’appelait le souci de ses propriétés dévastées par les invasions. Rutilius était originaire de la Gaule, peut-être de la région de Toulouse. Trois ans auparavant, en 414, il occupait les importantes fonctions de préfet de Rome, poste que son père avait déjà tenu, après avoir été Comes sacrarum largitionum et Quaestor sacri Palatii. Ses amis (il en nomme plus d’un dans son poème) étaient pour la plupart, comme lui-même, de hauts fonctionnaires et des lettrés.

Il choisit la route de mer, la jugeant plus commode. Elle lui réserva d’ailleurs quelques déboires. Il dut attendre pendant quinze jours le beau temps au Portus Augusti, et arrivé à Pise, au septième jour de ses courtes traversées, il y fut de nouveau bloqué par la tempête.

L’idée lui vint de raconter en vers son voyage, comme l’avaient fait avant lui Horace dans une de ses Satires[1], Ovide dans une pièce des Tristes[2], Stace dans un morceau des Silves[3]. J. Vessereau, à qui l’on doit une thèse volumineuse sur Rutilius et son poème, a supposé que cet itinéraire aurait été rédigé « au jour le jour, on pourrait presque dire heure par heure[4] », à mesure que les paysages se déroulaient sous les yeux de Rutilius. C’est — toutes proportions gardées — une illusion analogue à celle qui fait voir Ernest Renan notant d’inspiration, sur le rocher même de l’Acropole, sa fameuse prière. Le poème de Rutilius n’a, certes, rien de génial, mais il ne sent nullement l’improvisation. Il faut songer, en outre, qu’une

  1. Sat. I, v.
  2. I, 10.
  3. III, 2.
  4. Cl. Rutilius Namatianus, édition critique accompagnée d’une traduction française et d’un index. Paris, 1904, p. 254.