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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/490

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II

Les auteurs chrétiens ne pouvaient manquer d’utiliser le même procédé d’exposition, par exemple dans l’herméneutique biblique, pour laquelle les critiques alexandrins, commentateurs d’Homère, leur avaient légué de si autorisés modèles. « Au moment d’expliquer un récit, ou un groupe de paroles de Jésus, Origène soulève toutes les questions que pouvait susciter ce récit, cette parabole ou cette sentence. Ce sont des ἀπορίαι…, une sorte de programme de questions à examiner. Il les groupe avant d’y fournir la réponse qu’elles comportent[1]. »

Au surplus, de nouvelles raisons militaient pour développer chez les controversistes chrétiens l’emploi de cette méthode d’enseignement par questions et réponses. On sait quelle place la lecture privée de la Bible tint dans les milieux chrétiens, dès que la diffusion des exemplaires fut devenue suffisante et que des esprits de quelque culture eurent été atteints par la foi nouvelle. La Bible s’offrait à tous comme l’aliment le plus substantiel de la vie intellectuelle et de la vie mystique. Mais la lectio divina n’était pas — pour les intelligences d’élite, tout au moins — une lecture passive. Avec un discernement, un esprit critique toujours en éveil, certains lecteurs, certaines lectrices même, repéraient les difficultés des Livres Saints et en demandaient la solution aux maîtres dont la compétence était reconnue. Ce qu’ils y recherchaient, c’était avant tout

  1. E. de Faye, Origène, t. III, p. 156 et 172.