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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/88

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d’ensemble, en 1823[1]. Depuis lors, de savants paléographes étudièrent à nouveau le palimpseste, et c’est grâce à leurs travaux que Naber établit en 1867 l’édition qui fait autorité.

Le manuscrit de Mai ne nous a rendu qu’incomplètement l’œuvre de Fronton[2]. Cependant nous sommes à même de nous former une idée suffisamment précise de son personnage. Naber s’est fait dans sa préface l’interprète de l’impression générale, quand il a constaté (avec une bonne foi méritoire chez un éditeur) qu’il eût mieux valu pour la gloire de Fronton que ses œuvres ne fussent jamais retrouvées.

Non que sa physionomie morale soit complètement dénuée d’intérêt. Fronton était un fort brave homme, d’une vanité candide, un peu gâté par les adulations qui lui étaient prodiguées et l’influence dont il disposait, mais d’une honnêteté personnelle, d’une sincérité non douteuses. L’affection très vive de ses élèves, Lucius Verus et Marc-Aurèle, nous est garante de sa bonté naturelle. Antonin les lui avait confiés en 130, comme à l’orateur le plus réputé de l’époque, et comme à un lettré aussi maître de la langue grecque que de la langue latine. Sa correspondance reflète leur étroite intimité.

Mais on y voit aussi à plein la médiocrité intellectuelle du bon Fronton. Il est le type même, l’incarnation du rhéteur, qui trouve dans sa rhétorique une raison suffisante d’aimer la vie, de la juger belle et digne vraiment d’être vécue. Son rêve eût été de faire de Marc-Aurèle le

  1. Sa première édition, parue à Berlin en 1816, était fort défectueuse, et ne contenait que le texte de Milan.
  2. Il comprenait 340 feuillets, dont 194 seulement se sont conservés (53 à Rome, 14 : à Milan) : mais le déchiffrement du texte est parfois très difficile.