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Page:Labriolle - La Réaction païenne, 1934.djvu/90

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rata atque inopinata verba[1]. En toutes choses, il n’y a que la forme qui l’intéresse.

Presque rien ne subsiste des discours qui avaient établi la brillante réputation de Fronton. Nous en connaissons une dizaine par les allusions qu’il y fait lui-même ou par de brèves citations des Anciens. Ce sont, soit des discours judiciaires — réquisitoires ou plaidoiries — ; soit des discours politiques, — panégyriques d’Hadrien, remerciements adressés à Antonin le Pieux qui lui avait conféré le consulat en 143.

La seule de ces « oraisons » dont la perte soit vraiment regrettable, c’est celle qu’il avait lancée contre les chrétiens. C’est par l’Octavius de Minucius Felix que nous en savons l’existence. On connaît le cadre de ce joli dialogue. Profitant des vacances du barreau, Octavius, Minucius Felix et Cæcilius, son intime ami, se sont rendus à Ostie, villégiature préférée des Romains. Ils se dirigent un matin vers la mer, la brise marine au visage, quand Cæcilius, apercevant une statue de Sérapis, porte la main à sa bouche, selon le rite païen, et y imprime un baiser. Ses amis ont vu le geste, et en quelques mots ironiques Octavius reproche à Minucius Felix de laisser ainsi son cher Cæcilius donner dans de tels enfantillages. Ces paroles cinglantes ne sont pas relevées d’abord. Les trois amis continuent leur promenade et amusent leurs regards des spectacles qui s’offrent à eux. Mais l’air taciturne et chagrin de Cæcilius finit par frapper ses compagnons. Interrogé, Cæcilius avoue que la pointe lancée tout à l’heure par Octavius l’a piqué au

  1. IV, 3 (Naber, p. 63).