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Page:Lafenestre - Molière, 1909.djvu/197

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le style.

ments de Bérénice dont la préface est un écho des idées de Molière dans la Critique et l’Impromptu. Et lorsque l’auteur tragique nous donne la formule de son idéal, l’idéal classique, « une action simple soutenue de la violence des passions, de la beauté des sentiments et de l’éloquence de l’expression », que nous donne-t-il sinon la formule du chef-d’œuvre déjà réalisé, quatre ans avant, par Molière ?

« C’est peut-être à Molière que nous devons Racine », a dit Voltaire. Si cela est vrai pour l’auteur de Bérénice, combien cela l’est plus encore pour celui des Plaideurs ! Cette farce d’une élégance attique, qui devait malheureusement rester unique dans l’œuvre du poète tragique, comme les Menteurs dans celle de Corneille, unique aussi par la justesse enjouée et la perfection du style, sortait encore dune collaboration au cabaret. « Moitié en m’encourageant, moitié en mettant eux-mêmes la main à l’œuvre, mes amis me firent commencer une pièce qui fut bientôt achevée. » À cette époque, il y avait brouille entre Molière et son très ingrat protégé, mais si l’auteur de Sganarelle et des Fâcheux ne fut point de ceux qui mirent cette fois la main à la pâte, l’écho de son exubérante gaîté et de sa verve satirique y retentit pourtant d’un bout à l’autre.

Racine, parmi les contemporains, fut, d’ailleurs, le seul, au théâtre, dont le génie tira toutes les conséquences de l’initiative prise par Molière. Aucun de ses rivaux, sur la scène comique, n’était de taille à continuer son œuvre, ni dans la grande comédie de caractère, ni même dans la bouffonnerie satirique. Baron, son élève, n’y put faire qu’un effort incom-